Le droit de préemption (DPU)

Mis à jour le Mardi 31 mai 2022

Le droit de préemption en matière d’urbanisme peut être défini comme la faculté reconnue à l’Etat, une collectivité publique,  un établissement de coopération intercommunale…  de se substituer à l’acquéreur (ou au donataire dans certains cas) d’un bien que son propriétaire met en vente (ou donne). Pour pouvoir être préemptés, les biens immobiliers doivent impérativement être situés dans une zone de préemption.  

S'informer

Les différents droits de préemption

La finalité du droit de préemption est la réalisation d’opérations d’intérêt général.
En vertu de l’article L210-1 du Code de l'urbanisme, les différents droits de préemption en matière d’urbanisme reconnus par le législateur sont exercés en vue de :

  • la réalisation  d’actions et opérations d’aménagement d’intérêt général définies de façon très large par l’article L300-1 du même code (exemples : favoriser le développement des loisirs et du tourisme ou réaliser des équipements collectifs).
  • l'anticipation de l’érosion littorale sur la gestion des sols (nouveauté prévue par la loi Climat)
  • la protection des espaces naturels 
  • la protection des domaines nationaux
  • la protection du commerce de proximité

Le droit de préemption urbain (DPU)


Il est institué par délibération du conseil municipal ou de l’organe délibérant de l’établissement de coopération intercommunale dans les communes dotées d’un plan d’occupation des sols (POS) ou d’un plan local d’urbanisme (PLU) (Articles L211-1 et suivants du Code de l’urbanisme).
Bon à savoir : le DPU ne peut être instauré s’il existe une zone d'aménagement différé (ZAD) sur le même territoire.

Le droit de préemption exercé dans les zones d’aménagement différé (ZAD)

Ces zones sont créées par le préfet ou l’établissement de coopération intercommunale par arrêté. Ce texte fixe le périmètre de la zone et désigne le titulaire du droit de préemption. 

Dans quels cas une ZAD peut-elle être créée ? 

  • Dans le cadre du développement territorial du Grand Paris,
  • Pour la réalisation d’un projet d’intérêt majeur (art. L350-4 C. urbanisme),
  • Dans le périmètre d’une grande opération d’urbanisme (GOU)...

 Bon à savoir : certaines des règles régissant ces deux droits de préemption sont communes (Articles L213-1 et suivants du Code de l’urbanisme).
 

Le droit de préemption des communes en cas d’aliénation à titre onéreux des fonds artisanaux, fonds de commerce et baux commerciaux


Conformément à l’article L 214-1 du Code de l’urbanisme, « Le conseil municipal peut, par délibération motivée, délimiter un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité », à l’intérieur duquel les cessions de fonds artisanaux, de commerce, de baux commerciaux ou de certains terrains à usage commercial sont soumises au droit de préemption.
« A l'intérieur de ce périmètre, sont également soumises au droit de préemption visé à l'alinéa précédent les aliénations à titre onéreux de terrains portant ou destinés à porter des commerces d'une surface de vente comprise entre 300 et 1 000 mètres carrés ».

Il s’agit donc d’une faculté pour les communes, qui doit être motivée, En effet, ce droit de préemption doit avoir pour objectif la sauvegarde et la défense de la diversité de l’offre commerciale, en maintenant l’activité en place ou en favorisant le développement d’autres activités artisanales et commerciales, ainsi que la réalisation d’équipements commerciaux.  

Le droit de préemption dans les espaces sensibles naturels créés par le département (ENS)

Ce droit de préemption est applicable sur les ventes de terrains ou de droits sociaux donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance de terrains (article 215-9 du Code de l’urbanisme). A titre exceptionnel, la préemption peut s’exercer même en présence d'une construction, sous réserve que le terrain soit de dimension suffisante pour justifier son ouverture au public et que sa situation géographique le rende nécessaire à la mise en œuvre de la politique des espaces naturels sensibles (article 215-11 du Code de l’urbanisme).

Nouveauté : la loi climat (2021-1104 du 22 août 2021) a élargi le champ d’application du droit de préemption ENS aux donations entre vifs exception faite des donations familiales (art. L215-13-1  C. urb.,.)

Bon à savoir : l’institution de zones de préemption concernant les terrains dont la valeur écologique, paysagère et patrimoniale justifie une protection particulière et une gestion durable, appartient au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres. Ces zones sont situées à l'extérieur des zones délimitées par le département (article L215-2 C. de l’urbanisme). Le projet de périmètre est adressé pour avis au département et à la commune ou à l'établissement public de coopération intercommunale compétent.
Le droit de préemption du Conservatoire s’applique à toute cession de droits indivis portant sur un immeuble bâti ou non, ainsi qu'à la cession de la majorité des parts d'une société civile immobilière lorsque le patrimoine de cette société est constitué par une unité foncière, bâtie ou non.

Nouveauté : Le droit de préemption pour les biens exposés à l’érosion littérale (C. urb. L219-1 et s.) La loi climat ( 2021-1104 du 22 août 2021) a créé un nouveau droit de préemption au bénéfice de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale. Son objet est de permettre l’adoption de la gestion du foncier au recul du trait de côte. 
Il est exclusif de l’application du DPU, du droit de préemption dans les ZAD, et de celui sur les fonds de commerce baux et terrains commerciaux. En revanche il ne prévaut pas sur celui qui s’applique dans les espaces naturels sensibles.

Qui est titulaire du droit de préemption ?

  • En matière de DPU :  les titulaires sont déterminés par les articles L211-1 et L211-2 du Code de l’urbanisme. Il s’agit principalement de la commune, et parfois des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) 
  • En matière de ZAD :  ce peut être une collectivité publique, un établissement public y ayant vocation ou le concessionnaire d’une opération d’aménagement. (Article L212-2 du Code de l’urbanisme).

Le titulaire du droit de préemption urbain ou en zone d’aménagement différé peut déléguer son droit à l’Etat, à une collectivité locale, à un établissement public y ayant vocation ou au concessionnaire d’une opération d’aménagement (Article L213-3 du Code de l’urbanisme).

  • En matière d’espace naturel sensible : c’est le département qui est titulaire du droit de préemption. Toutefois, lorsque le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres est territorialement compétent, il peut se substituer au département si celui-ci n'exerce pas le droit de préemption. (Article L215-4 et 5 du Code de l’urbanisme). Le département peut déléguer son droit de préemption (Article L215-8 du Code de l’urbanisme).
  • En matière d’adaptation des territoires au recul du trait de côte : le droit préemption est réservé à la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale (L219-1 C. urbanisme.).

Focus sur le droit de préemption urbain (DPU)


Il permet à une collectivité publique d’acquérir en priorité un bien immobilier mis en vente ou faisant l’objet d’une donation (à l’exception de celles réalisées entre personnes d’une même famille) par une personne privée (particulier) ou morale (entreprise). Il est régi par les articles L211-1 et suivants du Code de l’urbanisme. La collectivité publique se substitue alors à l’acquéreur initial.

Les biens concernés

 

Le droit de préemption peut porter sur des terrains de toute nature (agricoles, constructibles...), mais aussi sur des maisons individuelles, des immeubles en copropriété, des appartements. Les parts et actions de société peuvent également être soumises au droit de préemption, comme par exemple les parts de sociétés civiles (sous certaines conditions), de sociétés d’attribution et de sociétés coopératives de construction.

Les droits de préemption urbains les plus courants  (Article L211-4) : 

Ils concernent :

  • L’aliénation d’un ou plusieurs lots de copropriété à usage d’habitation principale, à usage professionnel ou à usage professionnel et d’habitation dont le règlement de copropriété a moins de 10 ans. Cette durée est calculée depuis la publication dudit règlement.
  • L’aliénation d’un immeuble bâti dès lors que la construction est achevée depuis au moins 4 ans.

Les aliénations de lots de copropriété dont le règlement a plus de 10 ans ou les constructions achevées depuis moins de 4 ans sont exemptées de DPU. Toutefois, la commune, par délibération motivée, peut décider de les y soumettre. On parle alors de droit de de préemption renforcé ou DPU « renforcé ». Ledit droit de préemption renforcé étant également applicable, par arrêté motivé du préfet, dans les communes ayant fait l’objet d’un constat de carence au titre de l’article L. 302-9-1 du Code de la construction et de l’habitation (carence en logements sociaux).


Les modalités d’exercice du droit de préemption des articles L213-1 et suivants du Code de l’urbanisme et notamment du DPU


Remarque : elles concernent le droit de préemption urbain, mais également celui applicable dans les zones d’aménagement différé, pour partie le droit de préemption commercial des communes et le droit de préemption pour les biens exposés à l’érosion littérale. 

La déclaration d’intention d’aliéner ( DIA)
Le propriétaire qui souhaite céder son bien situé sur une zone de préemption doit adresser, en recommandée avec accusé de réception, une déclaration d’intention d’aliéner (DIA) à la mairie où se situe le bien ou la déposer contre décharge.
Cette déclaration doit comporter :

Elle constitue une offre de vente et doit donc être remplie avec beaucoup de soin. La collectivité publique dispose de deux mois pour faire savoir si elle souhaite ou non acquérir le bien aux conditions proposées par le vendeur. Elle peut profiter de ce délai pour négocier le prix (dans le cas d’une vente) ou la valeur du bien (dans le cas d’un échange ou d’un apport à une société).

Demande de renseignements complémentaires de la mairie
La loi prévoit la possibilité pour le titulaire du droit de préemption , dans le délai de deux mois dont il dispose pour se prononcer sur la DIA, d’adresser au propriétaire une demande unique de communication de renseignements complémentaires permettant d’apprécier :

  • la consistance et l’état de l’immeuble
  • le cas échéant, la situation sociale, financière et patrimoniale de la société civile immobilière

La loi prévoit également la possibilité pour la mairie de demander au vendeur à visiter le bien.


Bon à savoir : ces demandes complémentaires auront pour effet de suspendre le délai de deux mois requis pour la réponse du titulaire du droit de préemption. Il reprend à compter de la réception des documents ou de la visite du bien ou du refus de la visite. La vente sera retardée d’autant. Si le délai restant est inférieur à un mois, le titulaire disposera d’un délai d’un mois supplémentaire pour prendre sa décision, ce qui porte le délai à trois mois (Article L 213-2 du Code de l’urbanisme). 


Le juge compétent (article L213-4 du Code de l’urbanisme).
L'administration n'est pas tenue par le prix de vente convenu entre le vendeur et  l'acquéreur; elle peut faire une contre-proposition. A défaut d’accord amiable, le prix d’acquisition sera fixé judiciairement par la juridiction compétente en matière d’expropriation (Article L213-4 du Code de l’urbanisme). 

Droit de préemption et rôle du notaire


Quand le bien mis à la vente est préemptable, c’est le notaire  qui, en pratique, se charge d’informer la collectivité publique de la signature du compromis de vente ou de la promesse par le biais de la déclaration d’intention d’aliéner
Si la collectivité locale décide de préempter, le notaire chargé de la rédaction de l’acte vérifie si les procédures sont respectées. Si la collectivité renonce à préempter, la vente doit intervenir dans les trois ans de la décision de renonciation. A défaut, le droit devra être à nouveau purgé.
Que vous soyez le vendeur, l’acquéreur évincé ou encore le représentant de la collectivité locale, n’hésitez pas à solliciter les conseils de votre notaire en amont de la procédure. Vous éviterez ainsi les risques de contentieux, le blocage de la situation et l’éventuelle mise en cause de la responsabilité de la commune et de ses responsables.

Le notaire au service des collectivités territoriales