Prendre des dispositions testamentaires à l’étranger

Mis à jour le Lundi 7 octobre 2019

Tout Français se trouvant à l’étranger et qui souhaite rédiger un testament doit agir de telle sorte que la validité en soit reconnue à la fois par les autorités françaises et les autorités étrangères, notamment celles du lieu de sa résidence qui, du fait des circonstances au moment du décès peuvent être concernées.

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Comment procéder à la rédaction d’un testament ?

La Convention de la Haye « sur les conflits de lois en matière de forme des dispositions testamentaires » du 5 octobre 1961, entrée en vigueur en 1967, a considérablement élargi les possibilités. Elle est devenue le droit commun français, applicable même aux rapports qui n’intéressent aucun des Etats signataires, car elle est indépendante de toute condition de réciprocité. Il est d’aillieurs prévu à l’art. 75 du réglement UE n°650/2012 que cette convention subsite pour ce qui est de la validité en la forme des testaments et des testaments conjonctifs.

La convention de la Haye offre un choix important de lois compétentes. Selon l’article 1er de la convention, le testament est considéré valable quant à la forme si celle ci répond à la loi interne :

  • du lieu où le testateur a disposé ;
  • ou d’une nationalité possédée par le testateur, soit au moment où il a disposé, soit au moment de son décès ;
  • ou du lieu dans lequel le testateur avait son domicile, soit au moment où il a disposé, soit au moment de son décès ;
  • ou du lieu dans lequel le testateur avait sa résidence habituelle, soit au moment où il a disposé, soit au moment de son décès.ou du lieu de leur situation pour les immeubles (c’est-à-dire les biens immobiliers quels qu’ils soient, terrains, habitations…)

Que le testament soit rédigé en France ou à l’étranger, le testateur dispose d’une grande variété de choix quant à la forme testamentaire. Il existe, par exemple en droit français, plusieurs formes de testaments : authentique, olographe, mystique ou international. Le testament olographe et le testament authentique sont les deux formes les plus utilisées. Le testament est " olographe " lorsqu’il est écrit, daté et signé entièrement de la main de son auteur. Le recours aux conseils d’un notaire est cependant souhaitable afin que le testament ne puisse pas faire l’objet de plusieurs interprétations, pour être certain que son contenu est conforme à la volonté de son auteur et qu’il sera aisément exécuté.
En outre, même si on le rédige seul, il est vivement conseillé de déposer le testament chez un notaire pour qu’il soit inscrit au fichier des dernières volontés (à Venelles dans les Bouches-du-Rhône) ou sur les registres prévus à cet effet à l’étranger. Il sera ainsi retrouvé à coup sûr au moment du décès. Le testateur peut aussi choisir une forme plus solennelle en recourant au testament authentique. Le testament « authentique » est rédigé par le notaire lui-même, sous la dictée du testateur et en présence de deux témoins, ou reçu par deux notaires. Il est le plus sûr car il est incontestable.

Où se renseigner ?

  • Sur le site de l’Association du réseau européen des registres testamentaires (Arert), des fiches expliquent comment inscrire et rechercher un testament dans chacun des pays de l’Union européenne et en Croatie arert.eu/fiches-pratiques.html
  • Sur le droit des successions dans tous les pays de l’Union européenne, voir le site : www.successions-europe.eu

A qui doit-on s’adresser ?

Les multiples rattachements prévus par la Convention de la Haye permettent soit de tester dans les formes admises dans l’Etat de votre nationalité, soit de prendre des dispositions en la forme locale après renseignement auprès d’un juriste exerçant dans le pays de votre résidence. Depuis le 1er janvier 2005, les consulats de France des vingt-sept Etats de l’Union européenne, comme ceux d’Islande, de Norvège, de Suisse, d’Andorre, de Monaco et auprès du Saint-Siège, n’ont plus de fonctions notariales. Il est donc inutile de se rendre auprès des services consulaires de ces pays. En outre, un arrêté du 18/12/17 a fixé la liste des pays dont les consulats exercent des fonctions notariales (voir fiche Acte Authentique). En revanche, il est possible de se rapprocher d’un notaire dans les pays de droit latin (sur le site de l’UINL, à la rubrique contact, vous trouverez le notaire étranger le plus proche), d’un solicitor dans les pays de common law comme la Grande-Bretagne ou encore d’un avocat dans les pays scandinaves.

Si vous résidez à Londres pour des raisons professionnelles, vous pourrez ainsi établir un testament en la forme anglaise (l’article 9 du Wills Act 1837, tel que modifié par l’article 17 de l’Administration of Justice Act 1982, prévoit que le testament peut être dactylographié mais doit être signé par le testateur en présence de deux témoins majeurs). Ce testament sera valable en France. Pour lui faire produire des effets en France au moment du décès, le testament devra être traduit le document (s’il n’est pas déjà rédigé en français) et légalisé (si la légalisation est nécessaire). Avec la Grande-Bretagne, le document devra être revêtu de l’apostille.

Peut-on établir un testament conjoint, en couple par exemple ?

L’article 4 de la Convention prévoit « qu’elle s’applique également aux formes de dispositions testamentaires faites dans un même acte par deux ou plusieurs personne ». Cet article vise les testaments conjonctifs prohibés en France (art. 968 du Code civil) comme dans de nombreux autres pays où, en principe, le testament n’est valable que s’il est rédigé par une seule personne. La jurisprudence française a considéré que cette prohibition était une question de forme relevant de la loi du lieu de sa rédaction.

Dès lors, un testament conjonctif établi dans un pays qui admet sa validité sera valable en France. Deux époux français résidant en Allemagne peuvent établir un testament conjonctif afin de se léguer mutuellement la totalité de leur patrimoine (l’article 2265 du BGB le permettant lorsqu’il est l’oeuvre de deux époux). Ce testament sera reconnu en France sans difficulté. Il en serait de même en Suède ou au Danemark, où l’on admet le testament conjoint.

Quelles sont les dispositions qui peuvent être insérées dans un testament ?

La Convention de la Haye du 5 octobre 1961 s’applique à « toutes les dispositions testamentaires ». Outre l’attribution de biens à certaines personnes par l’institution du legs, le testament peut prévoir la désignation d’un exécuteur testamentaire qui consiste à veiller ou à procéder à l’exécution des volontés du testateur ou encore à la désignation des bénéficiaires d’un capital décès dans le cadre d’une assurance-vie. Le testament peut aussi englober des dispositions non successorales, par exemple la reconnaissance d’un enfant ou la désignation d’un tuteur, pour protéger ses enfants mineurs dans l’hypothèse d’un décès prématuré des parents. L’organisation des funérailles ou le souhait d’effectuer un don d’organes sont souvent inutiles car le testament est, dans la majorité des cas, ouvert bien plus tard.

Le réglement n°650/2014 sur les successions permet désormais de désigner, dans une disposition à cause de mort, la loi de l’Etat dont une personne possède la nationalité afin de régir sa succession. La loi choisie peut être celle d’un Etat membre (partie au réglement) ou celle d’un Etat tiers.

Comment l’exécution du testament sera-t-elle assurée ?

L’exécution des dispositions testamentaires se fera dans les limites de ce qu’autorise la loi successorale applicable. Depuis l’entrée en application du règlement (UE) n° 650/2012 du 4 juillet 2012 sur les successions internationales, la loi applicable à la succession sera, par principe et à défaut de choix, celle de la dernière résidence habituelle du défunt et cela pour l’ensemble des biens (art.21  §1). Ce critère déterminera la loi applicable à l’ensemble des opérations successorales.

Du fait du caractère universel du règlement, la loi applicable peut être celle d’un Etat partie au règlement (un des 25 Etats de l’Union européenne) ou d’un Etat tiers.

  • Si le droit français est applicable, les enfants seront héritiers réservataires, ce qui signifie qu’on ne peut les priver d’une part de la succession (calculée en fonction du nombre d’entre eux et de la présence ou non d’un conjoint). S’il n’est pas interdit à deux époux de disposer l’un en faveur de l’autre en présence de descendant (art.1094-1 Code civ.), le conjoint survivant ne pourra toutefois recueillir la totalité du patrimoine que si les enfants renoncent à exercer la réduction de la libéralité pour obtenir leur réserve (art.920 Code civ.).
  • Si le droit d’un autre pays s’applique, il conviendra de se renseigner auprès d’un juriste local pour connaître le contenu de la loi successorale étrangère. Bon nombre de pays ne connaissent pas la réserve héréditaire. Dans ce cas, le testament pourra s’appliquer sans aucune restriction.